" Partout, avec chaque explosion, la guerre forcé l’écran protecteur des réactions sensorielles, derrière lequel peut se constituer l’expérience, c’est-à-dire la durée qui s’écoule entre l’oubli salutaire et le souvenir salutaire. La vie s’est transformée en une suite intemporelle de chocs entre lesquels il y a des trous béants, des intervalles vides et paralysés. Or il n’y a rien peut-être de plus funeste pour l’avenir que le fait qu’à proprement parler bientôt plus personne ne sera en mesure de penser encore à cette guerre, car tout traumatisme et tout choc non surmonté chez ceux qui en reviennent est un germe de destruction à venir. "
(Theodor W. Adorno, Minima Moralia. Réflexions sur la vie mutilée).