vendredi 25 octobre 2013

Pourquoi donc écrire ?

Ecrire et vivre les choses réelles.  Tout un programme. Du monde de la guerre, de la barbaque, du sang. Comme deux enfants qui découvrent l’étal du boucher.  Et qui savent que seule la poésie leur rendra la force de Prométhée. Pratiquer la philosophie dangereuse. Celle de la communication réelle.  Non celle d’Hermes le servile, l’esclave de Zeus.

La honte d’être  humain, je ne l’éprouve pas seulement dans les  situations extrêmes parfaitement analysées par la Critique, mais dans des conditions insignifiantes devant la bassesse et la vulgarité d’existence qui hantent les démocratie-marchés. L’ignominie des possibilités de vies qui nous sont offertes, apparaît du dedans dans toute son horreur, toute sa réalité. Sans mots. Il n’y a pas d’autre moyens que de faire ce que la nature nous enjoint d’être: animal.

Transmuter le dégout en or.

La superstition, - les portes fermées, les papillons morts - réclame toujours un malin à deux têtes : "le diable qui exsude le mal et dispense d’affronter le feu du négatif, et le prince charmant, qui par un simple baiser, éveille les vertus et la morale". C’est tout le miracle de la science moderne que d’avoir réconcilié ces deux figures opposées à travers le transparent concept de “chaos “: de la bouillie originelle de tous les possibles au cybermarché libertaire.”

La théorie du chaos n’est que la descente de lit du couple amoureux. Elle ne lui  sert à rien pendant l’acte de création. Elle ne connait pas la volonté sublime qui réside, tant dans la conscience que dans le fantasme. Modèle importé clés en mains de l’inachèvement du langage mathématique, elle veut devenir l’abandon de toute praxis réelle sur la totalité. Le chaos est à la mécanique ce que le vouloir est à l’éthique.  L’ordre surgit du hasard. Le cybermarché libertaire mondial également. Soit. alors le désordre viendra de nos communications délibérées.

Toutes les guerres créent un climat typique où la femme devient le baromètre des secousses publiques. Nous construirons  des cités tremblantes d’envies.

(Avec l'aimable autorisation des Editions Idéaux Carrés - Nantes)


mercredi 23 octobre 2013

Personne ne connaît le coeur secret des horloges.

 


La pluie comme une buée au miroir de l'éthique. Il est 8 h 30. Je monte dans un véhicule à moteur de couleur bleue marine Le bitume dévore les kilomètres et nos propos sibyllins. Nous sommes quatre, deux hommes, deux femmes, et roulons vers une destination géométriquement repérable: les certitudes de l'amour pour l'une, les raisons inconscientes du sang pour l'autre, la  dérisoire participation au refus pour les deux autres. Question de forme : le style apparaîtra avec l'histoire. Car au fond c'est toujours d'invective dont il s'agit. Pourquoi nos mères nous laissent-elles cette mémoire du cri ? L'idée avait pris forme dans une errance. L'encre petit-poucet de nos questionnements respectifs. Mélange des plumes et des couleurs. L'i.d. serait  la poésie de toutes manoeuvres pour la beauté du monde. Convulsive. Cri. Les mots comme seules armes d'un bouleversement total. Ready-made et raidis mes dés. Pourquoi tant de formes répétées, pour nier la dialectique du vieux Hegel ?  

Point 53, kilomètre 224, vaste  zone de repli stratégique sur une ligne de front essentielle : la circulation autoroutière. Leurs aires d'arrêt confinent aux pestilences muettes des toilettes modernes. Triomphe de la transparence du verre, aveu de la communication zéro. D'un commun accord, nous refusons l'embaumement post-industriel et préférons nourrir nos corps mammifères entre goudron ruisselant,  béton sarcophage de la poésie et pelouse transgénique. Du déchet. De son absorption, de sa déglutition, de sa régurgitation. L'art du raccourci : l'ennemi est déjà là et il nous reste pourtant 173 kilomètres avant d'atteindre une de ses possibles localisations géographiques.  

Rue des Partisans : le paradoxe des lieux nommés. En cet endroit précis, périphérie pavillonnaire, domestication de la nature urbaine, nous nous séparons définitivement. Un verre d'eau pour quelques justificatifs : du choix de l'Autre illusoire, de celui de la saignée familiale, à celui du tremblement irrémédiable de l'ordre social. Traités de stratégies divers pour même reconnaissance du coeur secret des horloges. Un pari dans Paris. Il s'agit de passer aux cartes détaillées.500 feuillets A3 dans deux sacs à dos misérables et usés. Nous déployons nos armes. Première infiltration au coeur d'un des multiples épicentres du possible. Nous quittons très vite la survie des couloirs erratépéïsés  pour préférer le labyrinthe ludique et pollué des librairies complices. Comment diffuser nos idées ? Y a-t-il des banquets inavouables ? Désaccord entre nous : le plaisir de la répartie, du jeu verbal de la séduction. A trop aiguiser le sens renversé de nos idées, nos pas ivres nous mènent sur les rebords du rat. Karl Kraus est ce jour en position centrale sur l'échiquier. Ramon Gomez de la Serna, lui sert incrédule de palefrenier. Sourire de la jeune femme ( domestique ? esclave ?), aux teneurs mercantiles : certains patronymes déclenchent le silence : voyer et les portes se ferment. " Le véritable enjeu de cette société est la communication."  David me reproche un manque de style. De l'art de la boucle. Débat. Accord cependant parfait : pourquoi sommes nous convaincus qu'il ne faut pas pénétrer les gens par leur porte de service ?  

19 h 30 : miracle de l'  errance poétique, nous rejoignons à l'heure nos semblables pour communier au rituel des estomacs. Saint-Michel et le bruit des tiroirs caisses derrière les vitrines : je laisse lentement la soie sanguine du vin grec (des surplus européens)  emplir mon corps. David me sourit : l'heure approche.
22 h 00. Nos sacs à dos sont moins lourds : il reste à porter l'attaque initiale. Je pense au bruit de l'étoffe sur un pubis. Erection. La place est calme : derrière les barreaux d'acier dressés, les colonnes du palais Brognart n'ont pas besoin de signes. Phallus dressés. De la symbolique éternelle. De la domination. Le reste, tout le reste, AMI, OMC, FMI, etc. ne sont que les spermatozoïdes de la copulation de certains. Les véritables ennemis.  
- "On attend les nantais ! Vous en êtes ?".
- "Pourquoi faudrait-il seulement que Nantes soit une fête ?"  
- " Vous faites partie de l'ATTAC ?"  
- " Nous procédons aux prémices de toutes les attaques."  
- " Ca se mange ce que vous distribuez ?" 
- " Le désir ne se lie que la tête reposée, comme Louis XVI !"  
Accélération. Les fameux nantais  sont là, le muscadet aussi. Batailles pour une huître. Qu'importe la cause, il s'agit de rencontres. Les corps se touchent, les langues se délient. Le grondement sourd des djembés scrophuleux. Les degrés en fusions de plusieurs alcools inégaux. Les yeux détournés par quelques silhouettes affinées noires. Nous sommes près de 1000, les pavés commencent à  jaillir et fuser vers les portes muettes du temple. Au loin les sourires amusés de l'ordre en képi.
0 h 45. Ce qui devait être une autre nuit du 4 Août, vire au désastre des troupes. Sempiternels corps avachis, victoire des canettes sur la conscience. Les plus dignes s'esquivent en douceur. Plaisir personnel d'avoir insulté le chien de garde de la presse socialiste en vogue. Il ne nous reste plus qu'une dizaine d'actes de naissance de l'i.d., mais nos idées encore lucides éxècrent définitivement le gauchisme sale.
1 h 50. Repli stratégique. Nous sentons le poids du temps qui s'écoule sur nos corps meurtris. Propos sur l'ennui. Propos sur l'insolence. Nous croisons au hasard de nos pas le supermarché du sexe  en kit. Qu'est-ce que la dignité ? Considérations sur l'orientation géographique la plus pertinente. Que désirons-nous vraiment.?
Soudain, elle sont là devant nous, à la fois dans la beauté plastique du prêt à porter contemporain mais aussi et surtout dans l'expression fulgurante du désir. Elles titubent plus qu'elles ne marchent. Elles s'aspirent plus qu'elles ne respirent. Elles s'embrassent et s'enlacent sans pudeur aucune. Chevelures blondes, étoffes noires, corps tendus et gestes précis autour des reins. A qui parlent-elles ainsi : à elles mêmes ou au(x) tiers voyeur(s) de la rue. Nous avançons, nous piétinons, nous bafouillons. Instant magique de poésie ou déroute définitive des bataillons d'i.d.Elles sont citoyennes du monde, américaines, suédoises, qu'importe. Le côté savamment calculé de l'accent  maladroit , une madeleine au chocolat entre deux seins. Elles sont "nomades du XXè siècle", "étudiantes à normale-sup" "mobile-phone adeptes" "because future is on the web you see."  Excitation cognitive enchevêtrée au langage des corps. La percée était brillante, la malle au trésor est vide. David relance les dés. De l'art du jeté polysémique. Je rajoute un chant à Maldoror. Elles sont stupides, elles sont spectaculairement réifiées. Elles se quittent. Séparation et perte des repères : la division renvoie au doute. Piètres chevaliers, nous accompagnons la silhouette ersatz d'un corps femelle d'humain « jusqu'à la sécurité marchande"  de son quartier. » Nous manquons encore une fois de clairvoyance :  pourquoi lui demander l'autorisation d'aller boire un dernier verre chez elle?
03 h 20. Il pleut et nos repères géographiques sont nuls. Plaisir fugace de la désorientation associée au dérèglement des sens. Jeu : il s'agit de marcher droit devant. Inévitablement le fleuve sera ou ne sera pas. Le rythme de nos pas entraîne celui de nos mots. La vague lancinante de l'alexandrin ou la rythmique guerrière de l'octosyllabe. Débat. Pourquoi toujours des mots plutôt que du silence ?
4 h 25. Les troupes sont épuisées : où sont les tentes du repli. La fluidité libertaire -commerciale du plaisir sonorisé charrie ses derniers lots de viandes ivres, empaquetés dans du désir refoulé. Où sommes-nous dans cet enfer signalisé de néons. Conversation-cigarette avec deux boat-people provinciaux du naufrage moderne. Récurrence : "rien n'empêchera la vie d'être absolument passionnante!"  Mais "nous" ne "savons"  toujours pas "comment faire". Mais-ne-toujours-pas...  
4 h 50. Que fait la lumière de l'aube ? La Seine prend forme au lever du rideau. Elles sont encore deux, plus décentes, plus humaines,  plus ivres ?  
Question : "est-ce que vous avez peur ? "
Réponse : " du mensonge des mots sur les corps ?"  
Question : "est-ce que vous vous ennuyez ?"
Réponse : " l'enfer est-il sempiternellement ainsi ?"
Question : " que désirez-vous vraiment ?"
Le silence comme aveu. L'une d'elle va vite. Elle répond n'importe quoi. Puisqu' importe. Ca. Elle sait que nous savons qu'elle sait. Une stigmate comme l'ouverture de sa jupe fendue sur le dessus du genou. Accélération. Confusion. Report. Elle nous promet au pire les insultes que justifient le manque de style. Dernier regard tendu sur les lignes de son cou.
5 h 45 : Récapitulatifs des erreurs stratégiques. Bilan des opérations insuffisamment calculées. Etat des forces. Le chant XII du Purgatoire dans nos divines comédies. Demain nous devons reconnaître d'éventuelles alliances avec des sans-culottes. Nos coeurs secrets. Mon coeur. se créé....

 

 

 

 

 

La dialective négative à l'oeuvre dans les sciences.






« Quand à l’autre aspect du devenir de l’esprit (l’Histoire), c’est le devenir qui sait - ou connaît et qui se médiatise : c’est l’esprit aliéné ou extériorisé dans le temps. Mais cette aliénation ou extériorisation est tout autant aliénation ou extériorisation d’elle même. »

(G.W.F. Hegel : Phénoménologie de l’esprit, Paris, Gallimard - Tel, 1981) 


Depuis l’adoption définitive (avec Galilée et Descartes) de la méthode hypothético-déductive comme processus cognitif dominant dans la construction de savoirs objectifs, le sujet humain, dont Kant affirmait qu’ainsi « il ne serait plus tenu en laisse par la nature », est représenté comme un sujet totalisant, dont la capacité réflexive associée à celle d’analyse, permet une maîtrise sur les objets (ou ensembles de causes) qui l’entourent. 

Parler d' attitude ou de posture scientifiques questionne donc la séparation entre les notions de sujet et d’objet, mais au delà, le statut d’autorité du discours scientifique construit par un sujet, (lui même condamné à l’incomplétude) et la croyance dans le (ou les) discours de la science.


Un étonnant paradoxe gît au sein même de la pratique scientifique et de son analyse historique : pratiquée par un sujet (ou ensemble de)  sur un objet (ou ensemble de), se rappelant sans cesse à la rigueur positive (héritée de Bachelard puis Popper), elle emploie pourtant avec un étonnant sens de la polysémie les deux termes SUJET/OBJETS, pour parler d’elle même : « singularité du sujet scientifique », « objet de recherche », etc...


K Popper tient la science pour « un code contextualisé  dans un espace-temps donné. Il indique par là, que cette séparation entre sujet et objet, apparue comme moment fondateur de la modernité, (au sens où il s’agissait d’émanciper la nature humaine) est aujourd’hui davantage un argument d’autorité (tant au sens psychosociologique du terme qu’ à sa dimension épistémologique) qu’une réalité. Tout se passe comme si construisant la connaissance d’une communauté de semblables, le scientifique distinguait ceux qui y contribuent de ceux qui n’y contribuent point, tout en restant aveugle de sa propre posture face çà ses semblables. Celà en vue d’asseoir une forme d’autorité et de pouvoir sur eux. 

De son côté, interrogeant cette question du pouvoir par le discours,  I. Stengers ou J.P. Dupuy  montrent qu’il  s’agirait alors de décrire l’activité intuitivement passionnée du scientifique pour comprendre son rapport au savoir, comme un biais de son propre rapport au Pouvoir. L’autorité de compétence d’un chercheur n’exclut en rien sa part de subjectivité. Tout scientifique s’adresse de fait à d’autres sujets humains comme lui : ce qui le motive c’est la construction de liens autours d’objets. L’enjeu du pouvoir au sein des communautés scientifiques renvoie donc au débat politique et notamment à la question enchevêtrée de la Valeur/Domination..


Ce qui semble confirmé par la tradition de la « raison oraculaire » du discours scientifique, de l’ordre qu’il installe dans et autour de sa communauté et des croyances que cette raison oraculaire génère. La division et la classification des sciences (processus qui s’est accélérée au cours des XIXè et XXè siécles) répond-elle à une raison objective du point de vue des disciplines ? Où le contexte sociétal dans lequel elles prennent place les entraîne-t-elles vers une logique utilitariste, qu’en leur temps T. Adorno et M. Horkheimer avaient dénoncé, pointant même  la logique d’une dialectique  négative : la raison instrumentale, outil du logos déshumanise le sujet, désymbolise leurs relations, et à travers la double dimension du travail concret/abstrait (développé par Marx) aliène la conscience jusqu'à un point limite dénué d'éthos.

Il y a donc bien là un objet qui fait obstacle, qui échappe, au discours de la science devenue idéologie et qui ce faisant, pousse le sujet à ses limites. L’esprit libérateur, émancipateur, voire subversif de la science serait donc, dans sa capacité à amener le sujet à conjointement :

- mener la propre autocritique de son attitude scientifique ;

- accepter la dimension de point aveugle que constitue sa posture au sein du champ ;

- renoncer à l’idée de clôture du champ, dans lequel se déploie son objet d’étude ;

Y -aura-t''il un jour - comme le souhaitaient les Encyclopédistes - pleine lumière en l’une des sciences ?  Ou au contraire toute construction scientifique (aussi codée soit-elle) n’aspire-t-elle pas à l’idée de clôture opérationnelle, de science toute puissante, de raison arraisonnante, niant la part aveugle le manque structurel réel et symbolique) de  celui ou celle qui l’énonce et la déclame ?

A propos de la richesse





Autant que les phases de création,  les phases de de décomposition d'une société sont inexplicables. A Athènes, au VIè-Vè siècle avant J.C., on  a la création de la Démocratie, l'apparition des grands poètes tragiques, et une foule de créations extraordinaire sur le plan de la société civile. 400 ans plus tard, c'est déjà fini  et il n'y a par exemple plus aucun grand poète.  Pourquoi ? Certes la guerre du Péloponnèse et la défaite athénienne jouent certainement un grand rôle. Pourtant Thucydide écrit des pages immortelles sur la corruption généralisée et entre autre celle du langage,  dont les mots se mettent  à signifier le contraire de ce qu'ils signifiaient au départ, et à être utilisés dans des sens contradictoires en  fonction du contexte et de la place de celui ou celle qui les prononcent. Mais la défaite ne suffit pas pour expliquer  pourquoi  le "Démos",  le peuple n'est plus le même.  

De même que l'enlisement dans ce qu'on appelle la crise, ne peut suffire comme seule explication. Pourquoi les individus comme les sociétés perdent-ils leur pouvoir de création ? La période contemporaine est particulièrement troublante de ce point de vue : il y a eu tous ces mouvements d'émancipation en deux siècles : le mouvement ouvrier plus ou moins confisqué par le marxisme, puis le marxisme qui s'est lui même scindé en courants opposés et contradictoires:  le bolchévisme a donné le goulag, et la social-démocratie s'est prostituée au capital.  Le résultat est que la passion, l'énergie de ceux qui ont cru en ces idées, se sont évanouies au fur et à mesure que leur rêve s'altérait.

La participation est en partie liée à la force de la conviction, à quelque chose qui s'apparente de près à la croyance. C'est aussi une question de volonté. Et les deux sont inséparables  dans le domaine politique. L'histoire humaine est toute entière création. L'apparition de nouvelles formes sociales-historiques n'est pas prédictible, car elle n'est ni productible, ni  déductible de ce qui la précède. Un "sociologue-éthnologue-psychanalyste martien" qui aurait atterri en en 850 avant J. C. n'aurait certainement pas pu prédire la démocratie athénienne. Ni  en 1780 prédire la révolution française. Or dire que ces formes résultent d'une création non déterminée des êtres humains, signifie que leur création apparaît, du point de vue de la logique habituelle, comme un cercle vicieux. Ce n'est pas le paysan  vénérant son seigneur qui participe aux mouvements qui précèdent et suivent la nuit du 4 août. En même temps qu'il y a un mouvement collectif, les individus se transforment, et en même temps qu'ils changent, émerge un mouvement collectif. 

Il n'y a pas de sens à demander lequel précède l'autre : les deux présuppositions dépendent l'une de l'autre et sont crées en même temps.  Il est vrai  que les gens aujourd'hui ne croient plus à la possibilité d'une action de leur part  sur le Politique.  Ils ne  croient pas  parce qu'il ne veulent pas le croire, et ils ne veulent pas le croire parce que ils ne croient pas. Mais si jamais ils se mettent à le vouloir, alors ils croiront et ils pourront... Refuser tout fatalisme.Toute vie permet à un moment donné de comprendre que les significations historiques du monde dans lequel nous évoluons, n'ont pas de "source absolue", que leur véritable source est notre propre activité créatrice de sens. Une seule exigence de lucidité : nous sommes mortels ! 

La tâche d'un homme libre est donc de se savoir perdu dans ce monde à priori vide de sens mais de construire avec les autres quelque chose qui ait de la signification. Il n'y a pas de sens immanent dans  l'histoire , il n'y aura que le sens (ou le non sens) que nous serons capable de de créer. Les gens qui se faisaient tuer sur une barricade ou dans un mouvement de résistance le savaient : “c'est le fait que je me bats qui a un sens , non pas le fait que dans deux siècles ou plus il y aura une  société parfaite ”. Le Vieux Georges Bataille nous le rappelle avec clairvoyance lorsqu'il écrivait: 

 “ Chaque fois que le sens d’un débat dépend de la valeur fondamentale du mot utile,  c’est à dire chaque fois qu’une question essentielle touchant la vie des sociétés humaines est abordée, quelles que soient les personnes qui interviennent et quelles que soient les opinions représentées, il est possible d’affirmer que le débat est nécessairement faussé et que la question fondamentale est éludée. Il n’existe en effet aucun moyen correct, étant donné l’ensemble plus ou moins divergent des conceptions actuelles, qui permette de définir ce qui est utile aux hommes. Cette lacune est suffisamment marquée par le fait qu’il est constamment nécessaire de recourir de la façon la plus injustifiable à des principes que l’on cherche à situer au-delà de l’utile et du plaisir : l’honneur et le devoir sont hypocritement employés dans des combinaisons d’intérêt pécuniaire et, sans parler de Dieu, l’Esprit sert à masquer le désarroi intellectuel des quelques personnes qui refusent d’accepter un système ouvert.”

(Georges Bataille, La notion de dépense, in la Critique Sociale,   Paris, Janvier 1933)






Prolegomènes et Mode d'Emploi

De tous les mythes qui ont lancé l’homme à la conquête du monde, aux risques de la perdition, il en est un qui traverse toute l’ histoire de l’occident comme un fil rouge. Depuis l’origine des trois grands monothéismes (puis leurs ersatz) jusqu’au dernier état des techno-sciences occidentales devenues mondialisées : “La création est pour l’homme”  nous dit la bible... Et nombre de raclures scientifiques  domestiquées le répètent en termes équivalents : “la nature est faite pour servir l’homme”. Comble de l’anthropocentrisme, ceux qui n’ont jamais eu de proie, l’ont lâchée pour son image. C’est aspirer à une essence divine que de croire que la raison est toute puissante. 
Cogito ergo sum... Pourtant la logique la plus aiguisée comporte toujours un point aveugle. Et si les droites parallèles se rejoignaient ? Vous savez là, dans ce trou noir de la conscience. Division structurelle du sujet bien avant celle du socius. Le sujet , tension entre des deux forces contraires, doit  donc tendre à se réaliser dans la globalité des conduites, mais doit reconnaître à jamais son incomplétude.  Il n’y aura jamais maitrise de la nature.  Il y a lutte interne souvent. Lutte de classe toujours.

La route fut longue dit l'Histoire. Mais aujourd'hui rien ne manque au triomphe de la civilisation. Ni la terreur scientifique, ni l'épuisement mensonger de la démocratie participative surveillée, ni l'acculturation généralisée qui dégueule des têtes de gondole, ni enfin la misère affective. La stérilité universelle est partout  Le désert ne peut plus croître. L'illusion est totale. Devant l'évidence de la catastrophe, il y a ceux qui s'indignent et ceux qui prennent acte, ceux qui dénoncent et ceux qui s'organisent.  Il s'agira ici simplement de traquer les labyrinthes secrets des mots, ceux qui agencés ou éructés, nous font semblables pour construire une réalité sociale et prendre plaisir à dissoner cognitivement, quand l'émotion ressentie refuse toute catégorisation.

 L'évidence ne sera donc pas seulement affaire de  raisonnement de logique, ou de dialectique  Elle sera aussi du côté du sensible, de l'ineffable. Il n'y a pas qu'un Monde, mais des Mondes. Chaque monde a ses évidences. L'évidence sera ce qui se partage ou partage. Les Mots seront nos médiums; Jusque dans leurs labyrinthes secrets. Après quoi toute communication réelle  pourra redevenir possible, qui n'est plus postulée, qui est à bâtir. 

Mode d'emploi de ce Blog : 
Comme nous y invitait le grand Charles, si la correspondance des sens est source de construction d'un savoir (difficilement modèlisable en équation) nous inviterons le lecteur  ("hypocrite lecteur, mon semblable !") à croiser  son envie de traquer les mots dans leurs dérobades sémantiques, à travers cinq grandes catégories
1/ Au delà des Mots Prisonniers du Réel
2/ Philosophie à Coup de Marteau
3/ Enoncés Scientifiques et Paradoxes
4/ Vérités Fictionnelles et Mensonges de la Raison
5/ Carnets de Bords
Les algorythmes régissant la blogsophère étant ce qu'ils sont, chacun pourra donc butiner selon son envie
-de façon chronologie et  linéaire 
-ou de façon circulaire et non causale (Ad lib)

Bonne lecture critique




Point de vue de l’Aranea

    Ils avaient cherché refuge dans ces pierres ancestrales, accumulées les unes sur les autres depuis longtemps, et soudées par la magie d’...