mercredi 25 janvier 2023

A propos du dieu argent...


Quelques brefs extraits du remarquable livre

GENEALOGIE DU DIEU ARGENT

publié aux Editions ContreLittérature (Janvier 2023)


Extraits :

" La valeur monétaire d’une chose n’est pas déterminée par le temps de travail qu’elle nécessite, ni par sa rareté, ni par le besoin qu’on a d’elle. Si elle l’est, c’est parce que nous donnons une valeur monétaire à ce temps de travail, à cette rareté, à ce besoin. La valeur monétaire d’une chose n’existe tout simplement pas. Bien sûr, si l’eau devient rare, elle prendra beaucoup de valeur, mais cela ne détermine en rien son prix. C’est nous qui déterminons son prix. Et ce prix va priver tous ceux qui ne peuvent le payer de cette chose vitale. C’est comme ça que la valeur monétaire fausse la réalité. La réalité, ce n’est pas que certains – les riches – ont besoin d’eau. Tout le monde a besoin d’eau. La réalité, ce n’est pas qu’il est légitime que seuls les riches boivent. La réalité, c’est qu’il y a peu d’eau et qu’il faut prendre une décision tous ensemble par rapport à ce fait. L’argent est ce qui nous prive de décision. Sauf les riches bien sûr. L’argent, c’est quand les riches décident. Décident du prix de l’eau et du reste.

(…)

Les riches vivent dans une réalité illusoire, déconnectée de la vraie réalité. Par exemple, s’il manque d’eau, ils croient qu’ils ont légitimement le droit de posséder, d’user et d’abuser de l’eau, parce qu’ils la payent. La réalité humaine générale du manque d’eau n’a aucune légitimité pour eux.

La légitimité est tout entière annexée par la légalité économique. L’essence de l’argent est l’annexion du monde par les riches.

L’économie n’est rien d’autre que le traité de stratégie militaire qui permet aux riches d’annexer à l’argent l’esprit des hommes.

(…)

L’argent a dévalisé le monde de tout, de sorte que le monde est vide, sans intérêt, désenchanté – à moins d’avoir de l’argent. Et quand on a de l’argent, ce n’est pas pour vivre le monde, qui n’est plus rien sinon de façon inessentielle, périphérique, mais pour vivre l’argent, pour participer à la représentation universelle de la richesse. Le riche est celui qui sent non pas qu’il est riche, car il n’est riche de rien, sinon de façon inessentielle, périphérique, mais celui qui sent qu’il représente la richesse.

(…)

C’est seulement après des millénaires de pillage des communautés existantes, c’est-à-dire le plus souvent, des exploiteurs locaux, que les marchands se virent contraints de se saisir eux-mêmes de la sphère de l’exploitation. Et ceci pour une double mais simple raison : ils ont ruiné tous ceux qu’ils pillaient ; le pullulement de leur classe prospère les contraint à une concurrence féroce malgré le développement universel du marché. C’est donc une fois solidement établie la célébrité de l’argent comme ce qui a seul le pouvoir universel de réaliser la pensée des choses, une fois la toute-puissance de l’argent bien assurée, toute-puissance qui consiste uniquement dans la mise en spectacle millénaire et mondiale de sa toute-puissance, que le capitaliste peut se lancer lui-même dans l’exploitation en y introduisant le calcul des coûts de production. Le capitaliste ne peut calculer un coût qu’une fois que l’argent est bien présent comme idée dans toute chose. C’est seulement lorsque presque tout a été transformé en marchandises, en choses qui pensent, que l’exploitation proprement marchande peut débuter.

(…)

La marchandise, que le salarié convoite, est ce qui permet à la richesse de se pavaner. La marchandise est ce qui fait briller un temps la richesse aux yeux de tous les spectateurs ; le temps que s’effectue l’achat. Aussitôt achetée, la marchandise perd son éclat, perd totalement ce qui la faisait briller. Prestigieuse derrière la vitrine, vulgaire dès qu’elle rentre chez le consommateur. Car la richesse s’échappe de la marchandise, l’abandonne à sa trivialité, à l’instant même où la transaction s’effectue. Et c’est évidemment l’argent, la richesse jamais satisfaite parce que totalement abstraite, qui va ensuite permettre de produire de nouvelles marchandises ; c’est la richesse jamais satisfaite qui va pouvoir continuellement être réinjectée dans de nouveaux objets pour les faire briller. Et ainsi de suite.

(…)

Telle est la force corrosive de l’illusion : les riches croient se protéger de la laideur alors que leur laideur transparaît toujours plus aux yeux de tous ; conséquemment, les pauvres du monde entier croient de moins en moins les riches ; moins ils les croient, plus l’alchimie secrète opère ; plus se reforment les peuples en tant que seule force universelle capable de ramener le vrai dans le monde."

 Renseignez-vous ! 


 

1 commentaire:

  1. Nous sommes les rouages d'un monde paramétré et dirigé par des machines qui servent le dieu argent qui tient les rouages sous hypnose.

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