« Les grandes choses, il faut les taire ou parler d’elles avec
grandeur,
c’est-à-dire avec cynisme et innocence » (F. Nietzsche, 1885-1886)
Dès 1968, dans son ouvrage « Le droit à la ville » (Paris,
Anthropos) Henry Lefebvre, dénonce (au coeur de sa pensée) la mainmise de
la valeur d'échange sur la valeur d'usage. Elle s'organise en mettant la ville
au service du système de production industrielle et, partant, de la société capitaliste.
Avec l’avènement de la société
industrielle et le passage au mode de production capitaliste naît dans la ville
une inversion du rapport entre valeur d’usage et valeur d’échange. Le passage
au capitalisme et à l’ordre marchand provoque une mutation radicale qui inscrit
la ville dans une marchandisation d’elle-même et de la vie quotidienne. La ville
capitaliste prend la consommation comme centre de gravité : elle crée des lieux
de consommation et devient elle-même une marchandise à consommer. Selon H. Lefebvre,
dans la ville du Moyen âge occidental, les marchands et les banquiers s’établissaient
autour de la place, du marché, de la halle, pour y promouvoir l’échange et le
généraliser, pour étendre le domaine de la valeur d’échange; ce faisant, ils
oeuvraient la ville et en faisaient usage. Ils constituaient un agent
historique et social qui modelait la ville. Le marchand trouvait dans la ville
son point de rencontre, son port d’attache, son lieu de stratégie. Mais la
ville va peu à peu permettre la concentration des capitaux et l’accroissement
de la productivité. Dans le même temps, l’importance de la production agricole
va reculer devant l’importance de la production artisanale et industrielle du
marché, de la valeur d’échange, du capitalisme naissant. Les anciennes
centralités vont laisser la place à des centres de décision. Les noyaux
urbains, anciens lieux de rassemblement et de rencontre, notamment en vue d’y promouvoir
des échanges commerciaux, vont devenir eux-mêmes valeur d’échange, produits de
consommation, sorte de simulacre authentique en trompe l’oeil où la ville ne
sera plus que le spectre d’elle-même...
Avec des gens qui "se ruent vers les
ruines des villes anciennes pour les consommer touristiquement en
croyant guérir de leur nostalgie..."
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