« Après des millénaires de rationalité, la panique s'empare
de nouveau de l'humanité, dont la domination acquise sur la nature devenue
domination de l'homme excède de loin en horreur ce que les hommes eurent jamais
à craindre de la nature. »
Adorno (T.W), Minima moralia, réflexions sur la vie mutilée (1951),
Paris, Payot, 2003, p. 122.
« Quand tout le monde vous ment en permanence, le résultat
n’est pas que vous allez croire en ces mensonges, mais que plus personne ne
croira en plus rien. Un peuple qui ne peut plus rien croire, est privé – non seulement
de sa capacité d’agir – mais aussi de sa capacité de penser et de juger. Et d’un
tel peuple, vous ferez ce que vous voudrez... »
Arendt (H), Du mensonge à la violence. Essais de
politique contemporaine, Paris, Calmann-Lévy, 1972, p. 45
« Quant à la critique proprement dite, j’espère que les
philosophes comprendront ce que je vais dire : pour être juste,
c’est-à-dire pour avoir sa raison d’être, la critique doit être partiale,
passionnée, politique, c’est-à-dire faite à un point de vue exclusif, mais au
point de vue qui ouvre le plus d’horizons ».
Baudelaire (C), « Salon de 1846 », in Curiosités
esthétiques, Œuvres complètes 1868, p. 77.
Saison
1
(Régime de la fausse
conscience)
Une analyse superficiellement
écologiste pourrait trouver dans cette pandémie des raisons
d’espérer : réduction des transports inutiles (tout particulièrement
aériens), prévision d’un ralentissement de la croissance et donc prévision
d’une baisse des pollutions (par exemple, la chute d’activité en Chine a
diminué en février les émissions de gaz à effet de serre, de l’équivalent de la
production annuelle des Pays-Bas), etc.
Une analyse superficiellement
critique pourrait même se réjouir que le confinement donne à chacun le
temps et l’occasion de se poser la question du sens réel de la vie mutilée
qualifiée d’ordinaire, au point peut-être de se mettre à espérer déboucher
sur une critique radicale du consumérisme quotidien : rien de
plus bizarre aujourd’hui que de consacrer quelques minutes à regarder des
publicités télévisées, dont les contenus si peu essentiels sont si
évidemment en décalage avec la situation vécue…
On pourrait même croire,
selon certains démagogues superficiellement sociaux humanistes, à
l’avènement d’un changement de paradigme par lequel ces temps de
crise sont en train de fournir la preuve qu’un changement de cap
est possible. Mais quand le premier exemple concret fourni est – en France
– celui d’une relocalisation de l’industrie automobile des pièces
détachées, comment – au-delà de la colère mêlée de lassitude – ne pas
penser qu’on part de très, très loin… Et qu’aucun horizon d’utopie ne semble en
réalité se profiler.
Tout au contraire, ce qui
vient n’est ni l’insurrection, ni la grève générale, c’est une dystopie. Au
XIXe siècle, les socialistes les plus utopiques voyaient dans
les expérimentations minoritaires, les semences de la transformation sociale.
Mais ce qui est en train de se passer est une expérimentation – ni minoritaire,
ni majoritaire – mais totalitaire, dans laquelle la fin affichée – sauver
des vies – justifie tous les moyens. Quand on se souvient à quel point dans
les temps précédents, les gouvernements dits démocratiques ont fait preuve
d’insensibilité face aux vies définitivement réifiées, on peut s’attendre à ce que
la suite leur donne tout le temps pour accentuer la violence économique,
sociale et politique.
Saison 2
(Régime de l’impasse
cognitive)
Pourtant depuis quelques années, les alertes
répétées des scientifiques quant à la crise (systémique, écologique anthropologique)
provoquée par la démesure technique et
économique des sociétés post-industrielles, laissaient entrevoir la possibilité
d’un tel effondrement. Dans un tel contexte, une révolution de l’esprit, un renversement des modes de problématisation,
un nouveau questionnement du sens de la vie naturelle au sein dans un monde machinique
d’erzatz visant leur propre autonomie, semblait dès lors indispensable. Sans une
telle révolution cognitive, il ne semblait en effet pas envisageable de rompre
avec les logiques du calcul et de la production ordonnée par la seule rationalité
instrumentale, au sens où le calcul
conduit à sortir de ce qu’Aristote visait comme « la quête de la bonne
vie : l’amélioration réfléchie de ce qui existe déjà ».
Cette fuite en avant dans tous les domaines de
la vie aliénée et mutilée qui caractérise le capitalisme depuis son
essor, mettait en danger tant la survie de l’humanité que celle de la
biodiversité. Chacun d’entre nous le savait, chacun d’entre nous le redoutait,
chacun d’entre nous continuait dans l’illusion du même. Par confort de l’esprit,
par paresse intellectuelle, par renoncement cognitif. Certes rien n’était joué
d’avance, mais il n’était pas déraisonnable de penser que la mort, si nous n’y
prenions pas garde, pourrait avoir le dernier mot.
Pourtant, la conscience de cette mort - radicale
car définitive – n’a pas permis de commencer à mettre en œuvre un redressement
de la trajectoire. Comme s’il n’était pas possible de penser, d’imaginer, de rêver
autrement que sous le régime de la vie réifiée. Comme si malgré les avertissement
de Dante, « entré dans les entrailles de l’enfer », nous ne discernions
même plus le « purgatoire du principe espérance », voire le « paradis
d’une utopie matérialiste à visage humain ».
Face à cette impuissance de la pensée, la
nature nous a dès lors repris la parole. La pandémie, à laquelle personne ou
presque n’était préparé, est venue toutes et tous nous prendre à revers.
Brutalement, ce qui semblait inimaginable, un virus, l’a fait
advenir : la « machine, le système si souvent incriminés mais
jamais démontés » tout s’est arrêté ! La menace de mort, parce
qu’elle s’est soudain terriblement rapprochée, nous a fait préférer la survie à
la poursuite de notre trajectoire, révélant en creux le vide tragique de notre
pensée, l’osolecence du logos inanimé de l’antropos.
Saison 3
(Régime
de l’inconscient politique)
Dans sa contribution au savoir
(théorique et médical) sur l’être humain, S. Freud avait en son temps pris des positions politiques très
affirmées sur
cette possible tragédie à venir. Que ce soit seul ou dans des textes à 4 mains avec Romain Rolland ou Albert
Einstein. Aujourd’hui dans les circonstances d'une pandémie mondiale qui nous
assigne à éprouver en chair et en acte les limites de ce que nous
pensions comme le stade suprême de la liberté de mouvement et de
conscience, l'héritage se réclamant d'un tel auteur - si exigent sur le plan épistémologique - nous
invite
à reprendre un certains nombre
de concepts (qui avant de devenir des poncifs de la psychosociologie
instrumentalisée) on
eu le mérite d'être construits dans un modèle théorique,
dont la visée était
avant tout
(et le reste aujourd'hui) celle dévoilement de
processus aveugles au sujets qui composent un corps social.
Le premier de ces concepts est celui du
déni : «
déni
incontestable
» de la réalité de la
part des responsables politiques, quelle que soit leur obédience
politique à l’échelle du globe.
Le virus n’est pas responsable. Il a contaminé la planète sans états
d’âme et sans faire de distinction. L’Homme d’Etat lui a laissé la place libre : il était prévenu du danger, il n’a
pourtant rien prévu. C’est
une vraie tâche aveugle au sens freudien du terme, qui cache le désir
inconscient. De multiples alertes avaient annoncé la pandémie : la contagion
d’Ebola, puis de ESB, du SRAS, des grippes aviaires et porcines. Elle a servi
de scénario à des films, des livres de science-fiction. Des centaines
d’articles scientifiques l’avaient prévu. Ce déni qui procède de l’inconscient
cache bien à propos
un désir de faire souffrir,
de marquer la distance entre le citoyen et l’Homme d’Etat. La question se pose et la réponse se lit à la lueur du résultat : c’est une inadaptation de
plus en plus grande du système de santé. Les personnels soignants ont exprimé
avec force leur souffrance au travail, mais en vain. Depuis plus d’une décennie
l’organisation des soins a pâti d’une baisse importante du nombre de lits et du
personnel médical. Cette politique était-elle nécessaire pour faire des
économies ? Cette excuse ne tient pas, car l’argent nécessaire a toujours été disponible. Et aujourd’hui
la Banque Centrale
Européenne comme
la FED aux Etats-Unis, le
distribuent sans hésiter pour aider les grands
groupes. La préservation de la vie : la santé, l’éducation, la durée du temps
de travail sont comptabilisés comme s’il s’agissait de dépenses. En même temps
le vivant est rentabilisé avec les brevets, les médicaments, le secteur privé.
Cette financiarisation de la vie est prétexte à un sadisme inconscient. Tout se passe donc
comme si ce déni inconscient avait comme objectif le désir de faire souffrir.
Le second concept freudien à mobiliser
est celui de l'acte
manqué. A travers son double langage, celui électoraliste des promesses
par les mots (qui selon l'adage n'engagent que ceux que celles/ceux qui y croient) contredit au quotidien par des choix politique et stratégiques en actes (au
service d'un processus aveugle), l'homme politique post-keynesien - ne
pouvant avouer sa totale impuissance -
en est rendu à ce stade itératif de l'acte manqué. Aujourd’hui, l’Homme d’Etat
- prétendument démocrate
et civilisé - donne l’impression d’ajouter à la violence première du déni, le plaisir de l'acte manqué dans la compassion simulée
à l’égard de ses victimes, alors qu’il les a sciemment surexposées au danger. Comble de l'acte manqué,
il jouit de compatir avec eux sans changer de politique. Dès lors la vision de l’histoire selon laquelle le libéralisme
cherche le profit sans tenir compte de ceux qui le produisent – voir au détriment de leur épanouissement donc indirectement par
leur souffrance - est partagée bien au-delà des marxistes. Elle n’est pas
contradictoire avec un point de vue psychanalytique qui considère le sadisme comme le motif inconscient de bien des
événements historiques.
Cette interprétation
psychanalytique du politique avait déjà été envisagée dès les années 1930 par Adorno et Horkheimer et Marcuse. Ce sont les
travaux critiques de l’Ecole de Francfort qui trouvent peut-être leur
démonstration
la plus évidente aujourd’hui dans la dimension de l’inconscient politique à
l’œuvre dans la crise du Covid 19.
Saison 4
(Régime de la rationalité instrumentale)
Comme le déroulé prévisible et imparable
d’une pathologie collective annoncée, les effets cumulés de la fausse conscience,
de l’impasse cognitive, et de l’inconscient politique à l’œuvre deviennent alors
les ressorts essentiels d’une dystopie civilisationnelle où - à l’insu des sujets
eux-mêmes – la rationalité instrumentale process dialectique de la raison pratique
et de la raison pure, annihile définitivement la critique comme faculté de juger…
Car ce qui est devant nos yeux,
c’est la dystopie économique : il est trop tard pour
réviser des politiques antérieures qui aujourd’hui – par faute de moyens
financiers comme humains – déterminent une stratégie d’improvisation totale.
C’est même l’occasion, sinon l’aubaine, pour accélérer les processus de
dématérialisation des activités : télétravail, téléconsultation, la
web-école, la culture en un clic, etc. Que penser d’une société qui maintient
le travail tout en interdisant de partir en vacances ?
Car ce qui est devant nos yeux,
c’est la dystopie sociale, sous le nom de distanciation sociale,
car c’est bien d’isolement individuel qu’il s’agit. Et en traitant aujourd’hui
d’imbéciles les réfractaires au confinement, on continue dans cette
logique sociocidaire de la réduction de toute responsabilité. Que penser d’une
société qui ne semble capable de penser le confinement que sur le modèle
foucaldien de l’emprisonnement ?
Car ce qui est devant nos yeux,
c’est la dystopie politique : ses formes de contrôles numériques et
droniques, les listes démultipliées qui inventorient les lieux, les
déplacements, les activités, les comportements autorisés : tout ce qui
n’est pas permis devient interdit. Que penser d’une société dans laquelle cette
inversion du permis et de l’interdit semble ne susciter aucun débat
public ? Et après ?
Saison 5
(Régime de la
dialectique négative de la valeur)
Finalement dans le miroir
obscur de cette pandémie, l'état d’exception (ou d’urgence selon la terminologie
employée par chaque pays) semble avoir accompli – au moins en partie – le
rêve du Capital devenu sujet automate. Dans l'hypothèse où
l’épisode dystopique et sadique que nous vivons en ce moment, se révélerait
comme un épisode infini, il serait aisé d’imaginer une population
totalement habituée aux rapports virtuels, au confinement nourri par
Netflix et les services de livraison de nourriture à domicile. Les
voyages seraient interdits, restreints aux flux des marchandises, fruits d’un
secteur productif majoritairement automatisé. Le spectacle, qui depuis
longtemps s’efforçait de détruire la rue, d’abolir la rencontre et de faire
disparaître tous les espaces de dialogue – pour anéantir les alternatives à la pseudo-communication
spectaculaire – aurait finalement atteint son but. L’espace réel, délaissé
par les êtres humains confinés et obligés de s’enfuir dans la virtualité,
n’appartiendrait plus qu’aux marchandises. La circulation humaine, sous-produit
de la circulation des marchandises, serait finalement devenue superflue,
et le monde en entier livré aux marchandises et leurs passions, nouvelle
forme de fétichisme absolu[1]. Ceci n’est qu’un exercice d’imagination – un scénario improbable
pour l’instant – mais il est aisé d’anticiper que dans l’avenir nous pourrions
assister à une augmentation du contrôle des flux globaux et de la circulation
de personnes sous des prétextes sanitaires, avec une progressive normalisation
des procédés d’exception.
Finalement le corona
virus compris dans sa dramatique totalité, est à la fois le projet et le
résultat d'un mode de production et d'organisation sociale déterminés. Il n'est
pas un accident du monde réel, sa sortie de route inopinée… Il est le
cœur de la superfluité de l'homme dans une société réelle administrée par les
flux boursiers. Sous toutes ses formes particulières – information ou
propagande, publicité ou consommation directe de spectacles – le corona
virus constitue le modèle présent de la vie socialement dominante. Il est
l'affirmation omniprésente du choix déjà fait, dans la production, et sa
consommation corollaire. Forme et contenu du corona virus sont
identiquement la justification totale des conditions et des fins du système
existant. Où le Sujet n'est plus qu'un Objet. Où l'émancipation
(individuelle et collective) a définitivement laissé place à la réification
généralisée. Après la crise, viendra le temps des factures (et des fractures).
Et dans un tel contexte qui peut croire qu’un seul gouvernement dans le monde
en profitera pour imposer[1] un changement radical de cap ?. Imposer, non pas au sens
historique d’un régime totalitaire mais bien au sens d’une volonté politique
programmatique, issue d’une souveraineté
populaire , dont les élu(e)s d’une époque ne sont à travers le suffrage
démocratique que les vecteurs pratiques.
Mais dans un tel contexte
alors, la seule question qui vaille
reste (car à ce jour inachevée) celle de la forme-valeur posée – entre
autres – par le Vieux Karl dans sa si fameuse section I du Capital.
Marx opère à cet endroit une critique radicale, une rupture épistémologique
totale de la théorie ricardienne de la valeur comme travail dépensé.
C’est à partir de cette hypothèse qu’il parle du capital comme sujet automate[2]. Dès lors :
·
Le capitalisme
serait-il aujourd’hui la simple continuation - comme l’achèvement de l’économie
politique classique - de qui Marx aurait hérité pour son objet comme pour
ses concepts ? Dans une telle hypothèse le
capitalisme mutant de la globalisation se distinguerait seulement de
« l’économie classique » non par son
objet, mais par sa seule méthode, la
dialectique empruntée à Hegel ;
·
Ou bien, tout au contraire, Le
capitalisme financiarisé du XXIè (ou économie vulgaire) constituerait-il
une véritable rupture épistémologique tant dans son objet et sa théorisation,
que dans sa méthode ? Dans cette seconde hypothèse le
Capital représente alors la fondation en acte d’une discipline
nouvelle, d’une science - nécessitant à la fois le dépassement de l’économie politique
classique[3] et celui combiné des modèles[2]
hégélien et feuerbachien, restés finalement dans leur préhistoire[4].
La forme valeur comme le commencement absolu de l’histoire d’une science
échappant à l’Homme. Dont il conviendrait d'opérer de toute urgence la critique
radicale.
Bien loin des scénarios d’effondrement
ou de décroissance choisie, comment ne pas constater qu’après celle de
2001, celle de 2008, chaque crise aura été l’occasion d’une accélération des
formes les plus déshumanisantes de la vie en commun, au profit de l’avènement
scientifique (sans critique) de la forme valeur/sujet automate[5] ? Ce que nous ressentons comme le moins problématique en ce
moment est sans doute ce qui exige précisément d’être problématisé. Finalement,
au sortir du confinement, il nous faudra opérer une RÉELLE et DOUBLE distanciation :
·
d'abord la distanciation cognitive de la forme
valeur, colonisée par la religion de l'économie politique
classique ;
·
ensuite la distanciation anthropologique par
rapport à cette forme classique de société prétendument
moderne, occasion alors de repenser de manière critique les
séparations/réifications qui la fondent, et les limites imposées à la vie quotidienne
des sujets.
À défaut d'une telle
exigence intellectuelle, comment croire qu’à l’occasion de la sortie de cette
pandémie, c’est l’utopie qui viendra, si DÉFINITIVEMENT nous ne changeons
pas de logiciel cognitif !
[4] Les Thèses
sur Feuerbach sont onze courtes notes philosophiques écrites par Marx en 1845.
Elles esquissent une critique ou un dépassement de toutes les formes
d’idéalisme philosophique. Les thèses désignent « la
pratique » comme pierre de touche de la vérité, et non plus la « théorie »,
ni la pensée séparée et atomisée. À la critique de la philosophie idéaliste
et de ses critères de vérité, s'ajoute pour Marx l'inscription de la théorie
dans les rapports sociaux.
Concernant
Hegel, on sait que Marx a écrit de « la dialectique hégélienne qu’elle
est sur la tête [et qu’] il faut la retourner pour découvrir le noyau rationnel
sous l’enveloppe mystique ». On a souvent conclu de ce passage que
Marx avait appliqué la dialectique hégélienne sous sa forme rationnelle à
l’économie politique. Or une telle interprétation néglige l’insistance, commune
à Hegel et Marx, sur la dépendance des concepts à l’égard de leurs objets et
sur l’impossibilité, pour toute analyse rigoureuse, de se prévaloir d’une
méthode universellement valable par-delà la diversité des objets examinés.
[5] Lohoff (E)
- Trenckle (N), La grande dévalorisation : pourquoi la spéculation et
la dette de l’État ne sont pas les causes de la crise, Trad. Braun (P),
Briche (P) et Roulet (P), Paris, Post-Editions, 2014