"
- Et au bout de cet abîme ? La catastrophe ?
-
Je crois à la catastrophe finale. Pour un peu plus tard. Je ne sais
pas quelle forme elle prendra, mais je suis absolument sûr qu'elle
est inévitable."
"L'apocalypse atomique est devenue une vision de concierge : si elle est, sans doute, vraisemblable et fondée, elle n'est pas intéressante. C'est le destin de l'homme, en dehors de tous ces « accidents », qui est intéressant. Etant aventurier de nature, il ne finira pas dans son lit. Si tout va bien, il finira en dégénéré, impotent, une caricature de lui-même (...). Il ne peut se renouveler indéfiniment, étant donné le rythme accéléré de l'histoire, mais il peut se maintenir encore quelques siècles, comme survivant. Tout ce que fait l'homme se retourne contre lui : c'est là son destin, et la loi tragique de l'histoire. On paie pour tout, pour le bien et pour le mal."
"L'apocalypse atomique est devenue une vision de concierge : si elle est, sans doute, vraisemblable et fondée, elle n'est pas intéressante. C'est le destin de l'homme, en dehors de tous ces « accidents », qui est intéressant. Etant aventurier de nature, il ne finira pas dans son lit. Si tout va bien, il finira en dégénéré, impotent, une caricature de lui-même (...). Il ne peut se renouveler indéfiniment, étant donné le rythme accéléré de l'histoire, mais il peut se maintenir encore quelques siècles, comme survivant. Tout ce que fait l'homme se retourne contre lui : c'est là son destin, et la loi tragique de l'histoire. On paie pour tout, pour le bien et pour le mal."
(Cioran,
Entretiens,
pp. 57 [1979] et 161 [1985].)
"Ma
pensée a toujours été apocalyptique. (...) Ma vision est
apocalyptique, mais je ne dis pas que la fin du monde va venir
demain. Je ne dis pas non plus qu'elle ne viendra pas. Et sur ce plan
nous en sommes exactement au même point que ceux qui nous ont
précédés : nous ne savons pas (...) Seuls
le sacré et le poétique peuvent sauver les sociétés, parce qu'il peuvent créer des
inter-dits, des mystères, des rituels qui évacuent la violence. Il faut penser le
religieux archaïque non pas en termes de liberté et de morale, mais
dans ceux d'un mécanisme de sélection naturelle. Au départ,
l'invention du religieux est intermédiaire entre l'animal et
l'homme. Mon livre La
violence et le sacré
n'est pas suffisamment situé dans un contexte d'évolution qui
présuppose des centaines de milliers d'années, c'est-à-dire un
temps absolument inconcevable pour l'homme. Si j'avais à le
réécrire, il serait autre et montrerait qu'à cette échelle
évolutive le hasard opère différemment, puisque la mort y supprime
tous les « mauvais » hasards. Le mécanisme du bouc émissaire peut
se penser comme une source de bonnes mutations biologiques et
culturelles."
"J'aurais tendance à dire que Satan a perdu son pouvoir de mise en ordre, le pouvoir d'ordonner la société, mais qu'il n'a pas perdu son pouvoir de désordre. Satan, sur terre, là où il est tombé, ne peut plus s'enchaîner, établir l'ordre de sa propre transcendance, donc il est déchaîné, déchaîné dans son pouvoir de semer le désordre. C'est l'image de l'Apocalypse. (...) Les tentatives d'établissement d'un ordre divin ici-bas continueront à se succéder. L'erreur des idéalistes est de croire sans faille à ces tentatives, alors que la violence reste intérieure au monde. Le triomphe de la croix est le fait d'une infime minorité ; de sorte que, même si Satan est vaincu à chaque fois qu'un individu est sauvé, son pouvoir demeure. (...)
Satan
a été vaincu. Mais les hommes, au lieu de construire l'ordre qu'ils
désirent, risquent finalement de détruire tout à fait le monde.
Cet état de choses est historique."
(R. Girard, Celui par qui le scandale arrive, 2001, éd. "Pluriel", pp. 117, 135 et 148.)
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